karfa93

karfa93

Chapitre VII

 

          Nous fîmes un  premier passage rue Karolinestrass et à notre approche, nous avions entendu les chiens aboyer derrière le parapet. Je suis descendu vite fais et avant que les aboiements puissent réveiller le voisinage, rapidement, je lançais les boulettes de viandes spécialement préparées par Yves. A Paris, il fréquentait assez souvent une cité en allant sur la porte de Vanves ou les gens du voyage étaient en majorité et ils s’échangeaient pas mal d’idées, voir de services.

 

           Je remontais très vite dans le fourgon,

 

           --Il ne faudrait pas lésiner trop longtemps dans le quartier, les chiens ont dû donner l’éveil à l’intérieur !

 

           --T’inquiètes, le quartier est assez bruyant en fin soirée, et même si ils ont été alertés, ils ne s’en formaliseront pas, comme les chiens se sont arrêtés, ils penseront juste que c’est des fêtards attardés.

 

           --Je te laisse deux rues plus loin, je serais de retour dans une ½ heure maxi, il vaudrait mieux qu’on ne te voit pas avec moi, on sait jamais.

 

           Vingt-cinq minutes plus tard, Yves était de retour à vide cette fois.

 

           -- Ils ne m’ont jamais vu leurs donner la main avec une telle hâte, je leur ai dit que j’avais un chargement de prévu pour le retour et ça les a motivés pour accélérer la cadence !

 

          Mais je ne l’écoutais déjà plus tant j’étais concentré sur la suite des événements.

 

           En fait, ce n’était pas plus compliqué qu’une mission militaire. Dans toutes missions, il y a une phase d’information, une phase de repérage, une phase d’infiltration, une phase d’action et enfin une phase de repli.

 

           La phase d’information était plus ou moins remplie par les renseignements fournis par Fred, (je pense qu’il a été réglo, qu’il ne m’a pas raconté de chars (de bobards) car il pensait vraiment au début que je le laisserai en vie, mais après ses révélations, d’une part j’avais la rage quand j’ai appris où était séquestrée Marianne et d’autre part, si je l’avais relâché, je pouvais dire adieu à mon amie. Fred l’a compris vers la fin de notre « entretien » quand il s’est rendu compte que j’agissais seul et dans ce cas je ne pouvais pas me permettre de le laisser libre.

 

           Quand il s’est rendu compte de son erreur, il était trop tard, il m’en avait trop dit, sinon il n’était pas complètement idiot, et il aurait compris que moins il m’en dirait plus il avait de chance de rester en vie.

 

           Quoi qu’il en soit, j’en savais assez pour mener une opération de sauvetage et je pouvais décemment me fier aux infos de Fred. Donc la phase d’info était réalisée, la phase de repérage était en voie d’achèvement, il ne me restait qu’une dernière chose à voir : comment entrer sans bruit dans la maison. Les chiens étaient neutralisés, mais le dernier obstacle était la pénétration dans le pavillon. Là, j’avais peut-être une solution et il valait mieux qu’elle soit bonne, car l’idée de forcer un volet et briser une vitre ne m’enchantait pas vraiment.

 

          Yves gara sa camionnette le long de l’enceinte. Le mur faisait à tout casser 3 mètres cinquante de haut, si bien que je n’ai pas eu besoin du grappin de corde qu’il avait ramené.

 

          La rue était déserte et les chiens toujours silencieux, prestement, je me servis de la portière pour monter sur le toit du camion et du camion, je me hissais sur le mur ; en moins d’une minute, j’étais de l’autre côté, et 3 minutes plus tard j’ouvrais le portail à Fred.

 

           Silencieusement nous nous approchâmes du pavillon, tout était calme.

 

            En principe, à l’armée, ce genre d’infiltration se faisait plutôt vers 4, 5 heures du matin car c’est parait-il le moment ou les gardiens ou guetteurs étaient les moins vigilants, mais ici, il ne devait pas y avoir de guetteurs mis à par les chiens, chiens qui étaient maintenant neutralisés.

 

            Nous fîmes le tour de la villa et nous aperçûmes nos 3 gardiens, près de leur chenil,  dormant du sommeil du juste et théoriquement, ils en avaient pour une bonne dizaine d’heures.

 

           Je fouillais consciencieusement le tour de la maison  et je trouvais effectivement ce que je cherchais. Sur un des côtés de l’édifice, une ouverture près du sol d’une cinquantaine de centimètres sur 80 de large bouchée par une petite fenêtre en bois, fermée de l’extérieur par une simple tirette de métal.

 

           --Bingo, j’ai trouvé murmurais-je à Yves, c’est l’entrée du charbon, théoriquement, il doit y avoir un plan incliné qui donne sur la cave ! Je devrais pouvoir m’introduire par ici ! Attends-moi près de l’entrée !

 

            J’ouvris le trapillon et effectivement une pente inclinée me tendait les bras, il ne me restait plus qu’une incertitude, la fermeture de la porte de la cave.

 

           Les deux premières phases étaient réalisées, j’étais maintenant en pleine phase d’intervention.

 

           Yves nous avait trouvé quatre coutelas, deux chacun, un à la main, et l’autre fixé dans le dos, une lampe torche dans la bouche, je m’engageais silencieusement dans la cave à charbon.

 

           Part chance, vraiment (mis à part le fait que j’ai perdu Marianne), j’en avais pas mal depuis le début, et je pensais vraiment à ce moment là que j’allais inévitablement retrouver mon amie, la porte de la cave n’était pas fermée à clef. Pour moi, cette intervention de récupération ne devait souffrir d’aucun aléa. J’avais l’habitude de ce genre d’opération, je ne redoutais pas l’action et j’étais encore convaincu à ce moment là de revenir avec Marianne.

 

            Avant d’ouvrir la porte et de me rendre à l’étage supérieur, je sortis une casquette de ma poche ainsi qu’un foulard que je posais sur mon visage, on n’était jamais assez prudent.

 

            La remontée jusqu'à l’étage se passa sans problème et je me rendis à la porte d’entrée pour ouvrir à Yves.

 

             Je scrutais soigneusement le contour de la porte m’attendant à trouver un piège autour du chambranle, bien m’en prit, je repérais instantanément le système d’alarme. Durant mon entraînement militaire, bien que je n’ai pas suivi de stage spécial déminage, j’en ai appris suffisamment pour me défaire de ce type de piège, qui était  à vrai dire relativement simple.

 

            La porte ouverte, Yves pénétra et referma l’ouverture en douceur. Par geste, je lui rappelais le port de sa cagouille. Silencieusement, nous entreprîmes notre exploration. Au moyen d’une lame de couteau, j’entrepris d’ouvrir la première pièce. Pour dégager un huis, il vous suffit d’empoigner délicatement la poignée de la porte et d’engager doucement une lame de couteau entre le pêne et la gâche, (ou actuellement une carte de crédit fait parfaitement l’affaire) et vous pesez doucement sur le pêne en prenant appui latéralement sur la gâche et la porte s’ouvre sans bruit (si les gonds sont bien huilés). Il ne vous reste plus qu’à lâcher très précautionneusement  la pression exercée sur le pêne.

 

           Dans la pénombre, j’aperçus, une chambre avec semble t-il un confort assez complet et d’après Fred, il devait s’agir d’une des 3 mères maquerelles qui couchait au rez-de-chaussée. Je ne perdis pas de temps, et un coup bien assené à la base du cou, et j’étais sûr qu’elle ne se réveillerait pas dans l’heure qui suivrait, et quand elle le fera, cela sera avec un bon mal de tête.

 

            Les deux autres maquerelles dans les autres piaules suivirent le même sort, il ne me restait plus que les 4 malfrats et il ne s’était pas écoulé plus de dix minutes. On était dans les temps. Eux, d’après le défunt Fred, deux logeaient au RDC dans deux chambres séparées et les deux autres à l’étage dans 2 autres chambres. L’intervention était plus délicate mais pas impossible.

 

           Il me fallait trouver ces chambres avant d’ouvrir celles des filles, car elles pouvaient crier à leurs réveils, et ça, ce n’était pas conseillé.

 

           Très prudemment, j’ouvrai une autre pièce, manque de pot c’était la cuisine. Je continuai mon exploration et j’en ouvris une autre,  et là bingo, il y avait un homme qui ronflait comme un sonneur. Il s’endormit comme les femmes pour une bonne heure ;

 

           Yves, silencieusement passait derrière moi et attachait et bâillonnait consciencieusement nos dormeurs au cas très improbable ou ils se réveilleraient avant l’heure. Sept cordelettes et sept baillons, un pour chacun et 2 ou 3 en rabiot au cas où.

 

          Le deuxième comparse suivit le même chemin que les autres, il ne me restait que l’étage.

 

           Logiquement, une des 2 chambres, voir les deux,  devait se trouver près des escaliers que descendaient au RDC. Pourquoi, j’en sais rien, au pif, du moins c’est ce que je ferai si je devais garder quelqu’un.

 

           Les deux autres truands suivirent le même sort que leurs collègues. La place était normalement libre, vingt cinq minutes s’étaient écoulées tout allait pour le mieux.

 

            Je pris encore quelques précautions pour ouvrir les deux autres pièces. Dans la suivante, (elle n’était pas fermée), qui s’ouvrit, un gémissement me parvenait dans une pièce complètement noire, en promenant ma lampe, je vis une piaule capitonnée ou je découvrais un lit sur lequel reposait une jeune femme entièrement nue avec les deux bras et les deux jambes enserrés dans des colliers métalliques, une espèce de large tuyau genre gaine de climatisation d’une dizaine de centimètres de haut, posé sur le ventre et était relié au reste du lit afin que la victime ne puisse la renverser, et il existait une sorte d’étanchéité entre ce tuyau et l’abdomen de la jeune femme, à l’intérieur de ce cylindre, un liquide transparent à même la peau.

 

             Je finis par trouver la lumière et je dévisageai la jeune femme, elle paraissait jeune, 18 ans tout au plus, elle sommeillait tout en sanglotant. Mon cœur se mit à battre en songeant à Marianne, Yves entra derrière moi et essaya les clés d’un trousseau qu’il avait trouvé sur l’une des maquerelles, mon cœur se serra lorsque qu’on entreprit de la délivrer, elle était à peine lucide et je n’étais pas sûr qu’elle avait conscience qu’on était en train de lui sauver la vie.

 

            A l’odeur, le liquide était de l’essence pure, le calvaire qu’avait enduré la fille devait être atroce, au bout de quelques temps l’essence brûlerait la peau et la douleur augmenterait au fil des heures occasionnant une vive brûlure, par la suite,  la peau se remplacerait et au pire, il ne resterait que quelques cicatrices ressemblant à des vergetures. 

 

           Ces putains d’enculés avaient certainement du faire subir le même sort à Marianne et je commençais à m’échauffer sérieusement. Yves qui me dévisageait avait suivi ma métamorphose me demanda si je tiendrais le coup. Je lui répondis par un bref hochement de tête qui ne semblait pas le convaincre.

 

           La piaule suivante était fermée par un verrou extérieur ce qui me fit penser qu’on devrait être sur la bonne voie.

 

           La porte ouverte, nous révéla une chambre avec 2 lits superposés dans lesquels dormaient 4 filles menottées aux montants des lits. Je me précipitais pour les dévisager une par une, Marianne ne faisait pas partie du lot. Tandis qu’Yves commençais à les détacher aux moyens de son trousseau, je me ruais dans les autres pièces, je vis une autre chambre fermée de l’extérieur que j’ouvrais à la volée et le même spectacle m’attendait, 3 filles y reposaient menottées elles aussi. Je ne mis pas longtemps pour m’apercevoir que Marianne n’était toujours pas là et je me mis à courir comme un forcené dans  toute la maison.

 

           Les filles  délivrées qui commençaient à comprendre ce qui se passait se mirent à se parler     entres elles et l’une d’elle semblait parler français. Fébrilement, je sortis une photo de Marianne et lui demanda où elle se trouvait. La fille se mit à larmoyer et nous emmena jusqu’au RDC dans une pièce que je n’avais pas encore ouverte et pris dans un tiroir des photos anormalement  épaisses et j’ai appris par la suite que c’étaient des photos de polaroïd, (un appareil qui développait les photos juste après les avoir prisent). Ces photos montraient le visage d’une fille atrocement mutilé, un œil énucléé, les mains ressemblaient à 2 plaies ouvertes les ongles arrachés sur l’une d’elle et sur l’autre des bâtonnets enfoncés entre la peau et l’ongle. Elle était couchée à terre et se tenait encore sur un coude. On pouvait donc en déduire qu’elle était encore en vie au moment des prises de vues. Les photos ne pouvaient mentir, il s’agissait bien de Marianne, sa peau halée et ces cheveux noirs ne pouvaient laisser de doute.

 

            Je regardais la fille les yeux hagards, ne la voyant déjà plus, j’ai vaguement compris qu’elle avait enduré ce calvaire toute une nuit avant de décéder et ils avaient fait des photos pour servir d’exemple aux filles trop récalcitrantes.

 

            Un voile s’est déchiré dans mon cerveau et avant qu’Yves ne puisse intervenir, j’avais quitté la pièce  et je me ruais dans la première chambre occupée par un de ses tortionnaires et à grands coups de coutelas je me mis à le tailler en pièce. Les filles hurlaient et même Yves n’osât s’interposer. Je passais de chambre en chambre pour accomplir mon œuvre de mort. Je me souviens vaguement comme dans un brouillard, qu’une des maquerelles était en train d’essayer de se détacher lorsque je me précipitais sur elle et qu’elle avait eu le temps de me dévisager et que je n’avais plus mon foulard, et je dois dire que je m’en foutais comme de l’an 40 qu’elle puisse m’identifier.

 

            Dix minutes plus tard, ma folie meurtrière se calma quelque peu et Yves me propulsa dehors et ensuite dans la voiture, mon seul souvenir était fait de corps déchiquetés et des hurlements des filles.

 

            Plus tard sur le chemin du retour, Yves me dit qu’on avait eu une chance terrible de ne pas avoir ameuté le restant du quartier. Durant ma phase de folie, les filles se seraient habillées comme elles ont pu avec les fringues des trois maquerelles et sont toutes sorties sur nos talons, donc d’après lui, elles ne parleraient pas, il n’y avait en conséquence que peu de chance que l’on sache que c’était notre œuvre.

 

           Nous n’avons pas échangé une seule parole sur le chemin du retour, mon esprit était resté à Hambourg et je dois bien le dire à présent, qu’à ce moment là, et j’en ai honte,  j’ai regretté de ne pas avoir eu le temps de les avoir torturés un peu plus.

 

           Arrivé à paris, Yves fit l’aller/retour du camion à son appart pour me trouver des fringues car les miennes étaient un petit peu trop sanguinolent, pendant que je me changeais à l’arrière du véhicule, il me dit.

 

           --Whisky ou rhum ?

 

           --Rhum lui répondis-je machinalement !

 

           Et pendant qu’il me tendit une bouteille de la Mauny, il rajouta. J’ai un vieux tafia, vas-y avales ça, ça ira mieux après !

 

           Au bout de quelques rasades bues à même le goulot, il rompit le silence et déclara.

 

           --Et maintenant que comptes-tu faire ?

 

           --Que veux-tu que je fasse, je rentre à la caserne, j’ai déjà presque 48 heures de retard, il est mardi matin et je devais être de retour hier matin avant l’appel. Mais en prenant un train ce matin, je serais au quartier pour ce soir j’en serais quitte pour 15 jours de placard.

 

           Sans un mot, il me sortit de l’argent de sa poche.

 

           --Tiens pour ton billet, car je suppose que tu n’as plus rien ? Je ne te propose pas de te jeter à la gare de Lyon, car tu iras plus vite en métro !

 

           --Merci pour tout, je te ferais rendre l’argent par des collègues qui habitent Paris, il vaut mieux que l’on ne nous voit pas ensemble !

 

           Je le quittais après une longue accolade et je sortis prendre le métro.

 

          



31/10/2011
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 13 autres membres