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Veillée d'armes

 

 

Veillée d’armes

 

 

          Arrivés sur place, ils recommandèrent le directoire qui d’ailleurs, en ces heures graves, n’avait pas quitté les lieux et dormait et mangeait sur place.

 

 

 

          Les sages furent convoqués, et eux aussi, ils se mirent de suite à l’ouvrage pour déchiffrer cette arcane céleste, ils étaient déjà au courant de toute la situation depuis le début, aussi ils ne perdirent pas de temps en questions inutiles ou superflues, au pire, Nora était là pour leur venir en aide.

 

 

 

          Du côté des Naacans et Electrans, les choses ne bougeaient pas trop vite, l’anomalie avait englouti les systèmes de Sirius et d’Electre, et il semblait bien que la progression s’accélérait encore et pourtant, le phénomène n’avait commencé que depuis à peine plus d’un mois. Les terriens, vu les soubresauts qu’effectuait l’altération temporelle, se donnèrent encore un mois avant d’ordonner l’évacuation de la planète ; ils ne voulaient pas être pris de court, et redoutaient encore de brusques accélérations pires que ce qu’ils avaient vécues jusqu'à maintenant.

 

 

 

          Ugo et son équipe, n’avaient pas été remplacés comme le voulait la coutume, et le directoire siégeait quasiment depuis lors en permanence.

 

 

 

          Derek était maussade, il savait qu’il progressait, les bonds que faisait l’anomalie étaient là pour le lui prouver, et ce qu’il redoutait le plus était de savoir que l’ennemi semblait le surveiller, car à chaque fois qu’il faisait quelque chose pour essayer de le démasquer, l’agresseur réagissait de façon violente, en accélérant le processus, mais lui était toujours dans la panade, dans le flou, aussi, il prit une décision et retourna voir le conseil.

 

 

 

          -- Messieurs, vous avez tous remarqué les bonds spectaculaires en avant qu’effectue le phénomène à chaque fois que l’on tente d’en savoir plus sur nos agresseurs, et qu’actuellement, le front des événements ne se trouve plus qu’au deux tiers de distance de la Terre, alors que mathématiquement au début, nos calculs initiaux nous donnaient presque un an avant l’arrivée du front de l’anomalie et voyez où nous en sommes réellement au bout d’un mois et demi, s’il se produit encore une ou deux accélérations au processus, la Terre sera directement menacée, aussi, je me demande s’il est bien prudent de rester là !

 

 

 

          -- Je sais qu’il n’est pas dans mes prérogatives de présider ce conseil, mais à plusieurs reprises, vous m’avez demandé mon avis, aussi, je crois qu’il est temps d’évacuer !

 

 

 

          Ugo le coupa presque.

 

 

 

          -- Derek mon ami, l’heure n’est plus aux convenances, tout avis positif est bon à prendre, d’autant que tes conseils ont toujours été la plupart du temps très judicieux, aussi, si tu préconises l’évacuation, le directoire te suivra sans réfléchir, je suppose que cette recommandation ne touche que la population, les différents groupes de travail tel que les astrophysiciens, les sages et le directoire,  ne sont pas touchés par cet exode ?

 

 

 

          -- Oui, je suis désolé de vous imposer ce sacrifice, mais rien ne nous oblige à rester sur terre, nous pouvons parfaitement attendre en orbite où nous pourrions continuer à travailler et où nous pourrions nous échapper si la chose s’avérait nécessaire !

 

 

 

          -- Décidément, tu es plein de bon sens, j’avoue que personne ici ne possède une âme de martyr et ce n’est pas de gaîté de cœur que nous décidons de rester !

 

 

 

          -- Dans un premier temps, reprit Derek, la priorité sera donnée à l’évacuation, théoriquement, d’ici une semaine cela devrait être fini, ensuite, la flotte qui jusqu'à présent acheminait aide et matériels aux réfugiés, continuera le ravitaillement, seule une dizaine de navires installera des jalons sur le trajet de l’avancement de l’anomalie, ainsi, nous serons au courant quotidiennement de la progression du front !

 

 

 

          -- Lorsque tout cela sera en place, nous envisagerons l’option feu d’artifice de l’autre côté du vortex !

 

 

 

          -- Feu d’artifice, tu veux sans doute parler d’utilisation de bombe, je suppose, reprit Ugo !

 

 

 

          -- Ma foi oui, c’est une option comme une autre, le souffle de l’explosion d’une bombe de très forte puissance, à la base de la fuite, devrait en théorie « souffler » l’écoulement du fluide temporel, un peu comme on souffle une bougie, c’est tout au moins une théorie qui en vaut une autre !

 

 

 

          -- C’est vrai, elle comporte un risque, des dégâts éventuels liés aux perturbations causées par l’explosion qui pourraient être occasionnée dans le passé, et pourrait éventuellement avoir des risques de propagation dans le temps sur notre espace/temps local, mais sur 13 milliards d’années, les risques sont faibles et si désordre il y a, ils ont quand même le temps de se réparer, non ?

 

 

 

          -- C’est qu’il y a un autre gros problème, Derek !

 

 

 

          -- A oui, et lequel ?

 

 

 

          -- Nous ne possédons pas de bombe, ni forte, ni faible d’ailleurs, nous ne possédons aucune arme d’une façon générale !

 

 

 

          -- Aucune importance, j’avais prévu cet état de fait, et Nora, ma chère Nora qui pourtant est non-violente, nous a déjà calculé la puissance de l’engin et je crois qu’elle en a même fait commencer la fabrication !

 

 

 

          -- Elle est même déjà finie, devrais-tu dire, elle a une puissance d’un million de mégatonnes, mais je me heurte encore à un problème, que je n’ai hélas pas encore résolu !

 

Derek tendit l’oreille et Nora poursuivit.

 

 

 

          -- Oui, le trou de la fuite n’est apparemment pas très large, et heureusement pour nous, malgré tout, la force de l’explosion doit se produire perpendiculairement au trou de fuite et surtout pas dans tous les sens à 380 degrés, car d’une part, une partie de la charge destructive pourrait s’échapper et dans ce cas, adieu la planète et les Electrans risquent de ne pas être d’accord!

 

 

 

          -- Et il existe une autre difficulté, mais qui devrait être surmontée, c’est que les deux fuites doivent être soufflées en même temps pour éviter les réamorçages du flux temporel, donc il nous faut deux bombes et deux volontaires pour les poser de l’autre côté, à part cela, je n’ai aucun autre problème !

 

 

 

          -- Oui et bien tiens moi au courant dès que tu as trouvé une solution ! Surenchérit Derek.

 

 

 

          -- Et au fait, pour la devinette spatiale, t’as trouvé quelque chose ? Rajouta-t-il.

 

 

 

          Nora piqua la mouche et lui répondit.

 

 

 

          -- Dis donc, pour qui me prends-tu, je bosse 24 heures sur 24 depuis un mois, je pourrais normalement m’attendre à un peu plus de considérations de ta part !

 

 

 

          Cette remarque eut le don de calmer Derek, et il retrouva son sourire légendaire.

 

 

 

          -- C’est vrai, Nora excuses-moi, mais je suis moi-même sous pression et je ne me rends parfois pas compte du travail des autres !

 

 

 

          Il repartit chez les techniciens Naacans afin de passer ses nerfs sur eux.

 

 

 

          -- Alors, messieurs, vous avez trouvé quelque chose, car aujourd’hui même, on entreprend l’évacuation de la Terre et bonne nouvelle, vous ne faites pas partie du lot, quand dites-vous N’Bioco ?

 

 

 

           -- Si c’est là, votre manière de nous reprocher notre erreur, je vous rappelle que je ne suis qu’une victime, cela aurait parfaitement pu arriver à n’importe lequel des savants de la Terre et là, votre sarcasme aurait-il été le même ?

 

 

 

          -- Oh ! Là, tout doux N’Bioco, je ne vous en veux pas personnellement, ni à vous ni à quiconque de votre équipe d’ailleurs, c’est simplement une façon de passer mes nerfs, j’ai l’impression que l’on n’avance pas c’est tout, alors que l’autre salopard semble s’amuser avec nous, il paraît être au courant de tous nos faits et gestes, j’ai même l’impression qu’il nous devance tellement que j’en deviens parano !

 

 

 

          -- Calmez-vous, si vraiment vous êtes dans le vrai, ne lui donnez pas la joie qu’il pourrait en tirer, s’il vous entend et s’il vous voit aussi tendu !

 

 

 

          -- Vous avez sans doute raison, mais que voulez-vous, je ne suis pas un savant comme vous, habitué aux longues attentes que vous avez pour obtenir le résultat d’un test ou d’un calcul, je suis un homme d’action, et voyez-vous, l’inaction ne rend fou, je préfère encore mille fois mieux risquer ma vie en m’activant que de me ronger les sangs en tournant en rond !

 

 

 

          -- En parlant de risquer votre vie, je pense que le moment est sans doute venu pour utiliser votre solution du soufflage de la fuite, je désespère de trouver une autre solution, mais promettez-moi d’utiliser toute votre habilité pour conserver notre planète, j’aimerai assez la revoir après, quand tout sera fini, il nous reste une chance que dès le flux temporel stoppé, après la régression de l’anomalie, tout redevienne comme avant, aussi s’il existe la moindre chance de sauver ma planète, autant la saisir, non ?

 

 

 

          -- C’est vrai, vous nous donnez votre feu vert ?

 

 

 

          -- Oui, ce n’est pas de gaîté de cœur, mais il faut bien sauver l’Univers, non ?

 

 

 

          -- A ce propos, continua Derek, Nora coince sur un petit problème, si vous pouviez l’aider ?

 

 

 

          -- Oui, je sais, le flux de l’explosion, je m’en doutais, car de l’autre côté, il n’y a pas de point d’appui ou de déflecteur, nous sommes dans le vide complet !

 

 

 

          -- Rapprochez-vous d’elle, à deux, vous trouverez peut-être !

 

 

 

          -- Bon, je me sauve, je vais faire le plein d’énergie, si l’opération feu d’artifice doit se projeter bientôt, autant être au mieux de ma forme, et excusez-moi pour mon accueil de tout à l’heure !

 

 

 

          -- Pas de problème mon vieux, j’ai déjà oublié, quand tout sera fini, on en rigolera certainement !

 

 

 

          Derek s’éloigna, non sans s’empêcher de songer que c’était quand même un brave type ce N’Bioco, après la sortie qu’il lui avait faite, nombreuses seraient les personnes qui lui en auraient voulu et il fallait lui reconnaître cette qualité, il avait des nerfs d’acier.

 

 

 

          Et Derek appela Deborah pour aller faire le plein comme il dit.

 

 

 

          … Deb, ça risque de bouger dans les heures ou jours qui viennent, tu viens me rejoindre, on va à la station, faire le plein, ça te dit ?

 

 

 

          … Ok, on se retrouve à la crypte alors.

 

 

 

          Peu de temps après, ils se retrouvèrent en Astral et se branchèrent sur le réseau psychique qu’avait construit Derek

 

 

 

          Ils se ravitaillèrent et Derek en profita pour renforcer la sécurité de l’ensemble, il adjoignit un additif aux égrégores, il enleva la partie du programme qui consistait à la suite d’une rupture d’un lien, à la réalimentation de l’égrégore par un autre lien, ce qui est bien pour assurer une continuité mais le principe est désastreux en cas d’attaque du réseau ; aussi, Derek compléta le programme avec une sécurité qui consistait, suite à une rupture de joint, à isoler totalement la cellule touchée, l’égrégore ne pouvait se vider de son énergie par un usurpateur, car il avait ordre de se replier sur lui-même et de ne plus recevoir d’énergie de quiconque, même de l’intérieur, des gens qui l’ont créée.

 

 

 

          Si bien qu’en cas d’attaque, il faudrait détruire un à un les liens, pour mettre le réseau hors service, ce qui est pratiquement impossible, quant à l’égrégore, il ne reprenait ses fonctions que sur notre intervention et comme nous serions prévenus très tôt d’une agression contre le maillage, on pourrait intervenir à temps.

 

 

 

          Ces aménagements terminés, ils regagnèrent la Terre.

 

Dès leur arrivée, la bonne nouvelle qu’ils attendaient était enfin tombée, la solution de la canalisation de la force destructive avait enfin été trouvée par N’Bioco lui-même.

 

 

 

          L’Electran était si content d’avoir trouvé la solution, qu’il l’expliquait à qui voulait l’entendre.

 

 

 

          Finalement, la solution passait par l’utilisation d’une deuxième déflagration qui contiendrait la direction du flux de l’explosion principale au bon endroit.

 

 

 

          N’Bioco leurs donna des détails.

 

 

 

          -- Voyez-vous, imaginez que la faille soit une espèce d’entonnoir cosmique géant, qui flotte dans le vide d’où le temps s’écoulerait. Si l’on faisait sauter une bombe sans protection perpendiculairement à l’orifice, l’effet de souffle se disperserait dans toutes les directions, le souffle ne remplirait pas le rôle qu’on attend de lui.

 

 

 

          Cependant, si sur le « côté et à l’arrière » de cet entonnoir, une seconde déflagration devait avoir lieu, quelques millisecondes avant l’explosion de notre bombe principale, la force du flux du second souffle, partirait aussi dans toutes les directions, mais placée en retrait de l’embouchure de notre entonnoir, ne risquerait pas de le pénétrer, le blast ne pénétrera pas dans l’entonnoir et ne risquera pas de s’échapper par le goulot de celui-ci, alors qu’une partie de ce même flux servira à contenir la direction du flux de la deuxième explosion dans la bonne direction.

 

 

 

          -- Il n’y qu’un tout dernier handicap, les deux explosions principales doivent être déclenchées en même temps, comme je vous l’ai déjà expliqué, afin d’éviter le maintien de l’autoalimentassions du flux temporel ; mais je pense avoir une opinion là-dessus, Nora me dira ce qu’elle en pense.

 

 

 

          Nora réagit instantanément à l’énoncé de son nom.

 

-- Je vous écoute, Maître, (voilà qu’elle l’appelait par son titre et lui donnait du maître maintenant, ce qui ne pouvait que vouloir dire, qu’elle le considérait en haute estime), que voulez-vous savoir ?

 

 

 

          -- Nora, peux-tu réaliser un déclencheur psychique et l’adapter sur l’ordinateur portable que nous avons modifié ?

 

 

 

          -- Absolument, je suppose que c’est pour déclencher la mise à feu synchronique des bombes !

 

 

 

          -- Oui, j’aimerai un programme, avec déclenchement mental d’un retardateur intégré au système, qui provoquerait la mise à feu des deux explosions annexes, accouplé à un autre retardateur de dix millisecondes pour le déclencheur secondaire, engendrant les explosions finales, est-ce possible ?

 

 

 

          -- Affirmatif, mais, si je puis me permettre, vous aurez un problème avec votre ordinateur, car si j’ai bien compris, pour éviter le décalage temporel, qui pourrait exister entre l’embouchure et le goulot de l’entonnoir, vous ne placerez donc pas la commande, autrement dit l’ordinateur côté goulot, mais côté entonnoir, je me trompe, non ?

 

 

 

          -- C’est bien ça, tu raisonnes bien, mais où vois-tu un problème ?

 

-- Côté entonnoir, vous serez dans le vide spatial, le vide, ce n’est pas un problème pour le fonctionnement de l’ordinateur, mais avez-vous pensé au froid, vos composants électroniques risquent de geler instantanément ?

 

 

 

          -- Bien sûr que j’y ai songé, as-tu seulement fait une estimation de la température ambiante, de cette époque-là ?

 

 

 

          Et là, pour la première fois depuis qu’il connaissait Nora, Derek ne l’avait jamais, mais alors jamais vue, faire preuve d’humilité sans un arrière goût d’ironie. Et là, pour la première fois, elle semblait vraiment sincère.

 

 

 

          -- Non, Maître, je suis désolée, effectivement, à cette époque, la température résiduelle du fond de l’Univers est encore de l’ordre de 279° kelvin soit 6° Celsius très exactement, température largement suffisante pour un très bon fonctionnement informatique.

 

 

 

          -- Et bien, Nora te voilà bonne pour la ferraille, la prochaine fois que je pars avec l’Espérance, j’emmènerai N’Bioco, j’aurai moins de surprise !

 

 

 

          Nora ne disait plus rien, et semblait anéantie ; Deborah trouvant que la plaisanterie avait assez durée, mit fin à l’altercation.

 

 

 

          -- Bon, ça suffit tous les deux, on dirait des enfants qui se chamaillent, on a encore du pain sur la planche et pas de temps pour écouter vos jérémiades !

 

 

 

          Elle poursuivait.

 

 

 

          -- Nora, tu peux t’occuper de ce dispositif ?

 

 

 

          -- Absolument, je m’y mets sans tarder, les bombes elles, sont déjà prêtes, répondit-elle, complètement remise !

 

 

 

          Derek reprit son sérieux.

 

 

 

          -- Où en est l’évacuation des populations terrestres, dit-il en s’adressant à Ugo ?

 

 

 

          -- Elles ont commencé, avec un peu de chance, elles seront finies après-demain dans la journée ou dans trois jours maximum et bonne nouvelle, l’anomalie n’a pas  réagi à l’expatriation de la population et continue sa progression sans aggravation, ce qui nous permet d’évacuer dans de bonnes conditions et surtout sans stress, si son avancement continue ainsi, le front du flux ne devrait pas nous atteindre avant deux mois !

 

 

 

          -- Bon, alors cela signifie que nous avons deux jours de vacances, on en aura bien besoin, car je suppose que tout le monde est comme moi … sur les nerfs !

 

 

 

          Effectivement, malgré le danger toujours présent, l’ambiance se détendit quelque peu, et on pouvait même voir des esquisses de sourire sur les visages de certains.

 

 

 

          Il était en effet convenu, que même si Nora finissait le dispositif d’amorçage et d’horlogerie sur l’ordinateur, avant la fin de l’évacuation, par sécurité, rien ne serait tenté avant, au cas où notre entité, suite à notre pétarade, prenait l’envie, par représailles, d’accélérer le processus encore plus rapidement, au point d’englober la Terre en une seule fois.

 

 

 

          Derek s’adressa aux savants, aux philosophes qui bossaient toujours sur l’énigme spatiale et au directoire.

 

 

 

          -- Vous savez, maintenant, votre présence ici, n’est plus vraiment nécessaire, et rester plus longtemps vous ferait courir des risque inutiles, il est encore temps pour vous de partir si vous le faites, ce ne serait pas déshonorant pour autant, vous pouvez parfaitement continuer à travailler à Bona Fortuna …

 

 

 

          N’Bioco ne le laissa même pas finir sa phrase qu’il répliqua.

 

 

 

          -- Vous plaisantez, mon vieux, nous ne sommes pas comme vous des foudres de guerre, mis pour rien au monde, nous ne raterions ce spectacle et c’est quand même de nos patries qu’il s’agit et la moindre des choses, est que nous soyons présents le jour où nous jouons notre va-tout, vous ne croyez pas ?

 

 

 

          C’est Ugo qui reprit la parole.

 

 

 

          -- Les membres du directoire qui voudront rester le feront avec moi, par compte, les sages et les philosophes qui travaillent sur le rébus partiront sur Bona Fortuna.

 

Quelques protestations dans les rangs des sages, vite réprimées par Ugo, qui sous un air indolent, prouvait qu’il pouvait aussi montrer de la fermeté.

 

 

 

          -- Je sais que tous voudraient rester, mais votre travail est important et vous ne devez courir aucun risque, aussi, vous partirez tous, c’est un ordre, c’est la première fois de mon existence et certainement aussi la première dans l’histoire de la Terre depuis les 500 dernières années, qu’un ordre est donné au lieu d’une recommandation ou d’un conseil, mais ceci est sans appel, vous partirez vous mettre à l’abri !

 

 

 

          Le groupe des sages baisèrent la tête, la décision, ils le savaient, était sans appel.

 

 

 

          Derek prit Deborah par la main, et déclara.

 

 

 

          -- Nous, Deb et moi, cela fait des mois qu’on n’a pas eu d’intimité, aussi, avec votre permission, inutile de nous appeler, nous serons aux abonnés absents !

 

 

 

          Sur ces bonnes paroles, ils disparurent tous les deux.

 

 

 

          Ils mirent leurs deux jours à profit pour se balader, sur la planète, ils voulaient en profiter au maximum, car ils savaient, l’un et l’autre, qu’en cas d’échec, ils ne la reverraient plus et honnêtement, ce genre de promenade, ne leur était plus arrivée depuis plus d’un an ; cela remontait à l’époque où ils ne connaissaient pas encore les Veilleurs, l’époque bénie où Deborah passait ses journées à l’emmener par monts et par vaux, lui faisant découvrir des endroits plus beaux les uns que les autres.

 

 

 

          La seule différence avec cette époque, c’est que c’était l’ordinateur qui les téléportait, maintenant, ils pouvaient se passer de ses services et assurer leurs déplacements par leurs propres moyens.

 

 

 

          Ces deux jours furent paradisiaques et bien sûr comme tout ce qui est idyllique, cela hélas ne dura pas, le fait aussi qu’il n’y avait plus aucun être humain, donnait à leur escapade un parfum de création du monde puisqu’ils étaient les deux seuls êtres vivants, (mis à part les animaux), à séjourner sur la planète.

 

 

 

          Ils avaient fait l’amour  plusieurs fois depuis le début de leurs « vacances », tendrement, passionnément parfois violemment, non sans une arrière pensée, que cela pouvait être la dernière fois. Ils ne pouvaient s’empêcher d’y penser.

 

 

 

          Deborah avait choisi une lamaserie pour cette dernière journée, située en moyenne altitude du Tibet, l’édifice dominait les vallées voisines et vers 6 heures, ce matin, le jour se leva et serrés l’un contre l’autre, assis sur un vieux banc de pierre, le couple, en frissonnant légèrement, admirait en silence, le levé du soleil sur les montagnes avoisinantes, Deborah ne pouvait ne pas penser à l’épreuve qui les attendait et à cette évocation, elle sanglotait doucement, la tête penchée sur l’épaule de Derek, elle accusait le contrecoup de tous les événements passés et sans doute la triste perspective, toujours éventuelle, de perdre la bataille, finissait de l’attrister.

 

 

 

          Il faut dire qu’à sa décharge, depuis près de deux mois, ils n’ont eu aucune journée pour décompresser et là, pour son deuxième jour de relâche, elle avait craqué, ses nerfs avaient lâché. Derek ne pouvait la blâmer, en y réfléchissant, lui aussi était affligé, il aurait voulu pleurer mais il savait que cela n’aiderait en rien la situation, bien au contraire, s’il se laissait aller maintenant, il détruirait complètement le peu d’optimiste qui sommeillant encore en lui.

 

 

 

          Et pire, il anéantirait entièrement le réconfort qu’il apportait à Deborah.

 

 

 

          Ce matin, il venait de comprendre qu’elle lui faisait une confiance aveugle depuis le début,  qu’elle soutirait sa force à travers lui, depuis le début de leur aventure, toute cette audace dont elle avait fait preuve, c’était au fond de lui qu’elle la puisait. Aussi, il comprit qu’il ne devait pas craquer à son tour, malgré la fatigue, malgré le désespoir, malgré l’incertitude de l’enjeu ; il ne devait pas, à son tour baisser les bras, il ne devait et ne pouvait pas la décevoir car il n’avait pas le droit de trahir cette confiance.

 

 

 

          Et tous ces milliards de personnes qui comptaient sur eux pour cette opération de la dernière chance, toutes ces personnes qui au fond de leur retraite, avaient mis leur espoir en eux, alors qu’en y réfléchissant, ils avaient aussi peur qu’eux, si ce n’était peut-être encore plus. La peur lui venait, rien qu’à l’idée de se présenter dans la mâchoire du monstre comme Derek l’appelait, cet entonnoir cosmique, qu’il lui fallait affronter de nouveau, mais cette fois en transportant ces engins de mort avec lui.

 

 

 

          De plus à la simple évocation de savoir qu’il avait besoin de Deborah pour cette intervention, le rendait malade, si le plan foirait, il savait qu’il la conduirait à l’abattoir à la moindre erreur et la pensée d’une telle échéance le tenaillait comme une lame de couteau dans l’estomac, il avait mal, très mal, rien qu’à imaginer qu’il soit responsable de sa mort.

 

 

 

          Il fallait absolument que cela fonctionne, si leur intervention avait le moindre ratage, il n’y aurait pas de seconde chance, il le savait, car l’autre salopard n’hésiterait pas à accélérer la progression de son œuvre de mort. Le plus dur dans cette histoire, c’est qu’il avait le sentiment, que leur agresseur s’amusait avec eux, comme le chat avec une souris. Il était persuadé qu’il avait les moyens de le détruire plus rapidement, et qu’il ne cherchait au juste qu’à jouer avec eux.

 

 

 

          Discrètement, durant la nuit, Derek, profitant du sommeil de Deborah, essaya de s’évader en Astral, et de là tenta une excursion dans le futur pour essayer d’en savoir plus sur l’évolution de la situation. Cette intervention qu’ils devaient effectuer, ne lui plaisait guère, il exposait directement Deborah au danger, et il n’aimait pas ça.

 

 

 

          Et le but de sa visite dans le futur était juste pour voir si Deborah s’en sortirait.

 

 

 

          Et ce qu’il avait vu n’était guère réjouissant pour lui, car apparemment, s’il s’en tenait au scénario qu’il avait imaginé, la fuite se boucherait et l’anomalie régresserait, mais tout cela se ferait sans lui. Il ne se voyait pas dans le futur partager la joie de ses amis.

 

 

 

          Il n’était, bien sûr, pas question d’en parler à Deborah, sauver l’Univers était plus important.

 

 

 

          Deborah avait cessé de sangloter et voulut rompre le silence.

 

 

 

          -- Derek, que va-t-il se passer si…

 

 

 

          Elle ne put terminer sa phrase, Derek l’avait bâillonnée d’un baiser.

 

 

 

          -- Nous réussirons, aussi pourquoi te pauses-tu toutes ces questions, ce n’est pas la peine d’évoquer une chose qui n’a aucune chance de se produire ?

 

 

 

          -- Oui je sais, mais c’est plus fort que moi, dans quelques heures, nous serons certainement de l’autre côté de l’anomalie et…

 

 

 

          -- Et nous ne nous poserons plus ce genre de question et le boulot terminé, on rentrera pour annoncer au directoire qu’il est temps de rapatrier nos petits protégés au bercail, et dans cette histoire, ce seront eux les plus chanceux, ils seront partis en villégiature avec le gîte et le couvert compris, des vacances payées sur Bona Fortuna en quelque sorte, ce n’est pas tous les jours qu’ils auront cette opportunité, elle est pas belle la vie ?

 

 

 

          Deborah ne put s’empêcher de sourire, apparemment, les plaisanteries de Derek avaient réussi à lui rendre sa bonne humeur.

 

 

 

          Derek voyant qu’elle avait repris du poil de la bête en profita pour lui proposer de changer d’endroit, il avait compris que la position qu’ils occupaient était propice à la rêverie et aux effusions et, pour éviter qu’elle ne reprenne des idées noires il fallait bouger de là.

 

 

 

          -- Allez, on va prendre le petit-déj’ ?

 

 

 

          Il se leva d’un bond et l’aida à se mettre debout.

 

 

 

          -- On va où, t’as réservé quelque part où l’on peut venir à l’improviste ?

 

 

 

          Deborah, cette fois, partit d’un rire franc et direct, toute morosité enlevée.

 

 

 

          Ils traînèrent encore quelques heures dans le temple, et dès les premières chaleurs du début d’après-midi, ils décidèrent qu’il était temps de rentrer au bercail.

 

 

 

          Arrivés sur place, à bord d’un des vaisseaux qui servait de PC aux autorités terriennes et étrangères, tous étaient présents au grand complet et attendaient semble-t-il leur retour ; tous se taisaient, l’air grave, espérant sans doute que ce soit le couple qui rompe le silence en premier.

 

 

 

          Ce silence déplut assez à Derek, car il craignait que cette discrétion lourde de signification, ne réveille la morosité de Deborah.

 

 

 

          -- Vous en faites une de ces têtes d’enterrement, vous avez perdu quelqu’un de proche ou c’est un truc que vous avez mangé, qui ne passe pas et vous pèse sur l’estomac ?

 

 

 

          Seule Deborah rit de cette boutade, mais les visages de leurs interlocuteurs se déridèrent un peu.

 

 

 

          -- Tu as de la chance, Derek, de pouvoir plaisanter à un moment pareil, tu es si brave que cela ou es-tu tout simplement inconscient ? Rétorqua Ugo.

 

 

 

          -- Un peu des deux, fatalement, sinon, je risquerais de m’ennuyer, et chez moi, on dit qu’il faut être un peu barjot si l’on veut être brave !

 

 

 

          Cette fois, la plaisanterie gagna l’ensemble du groupe.

 

 

 

          Derek trouvant qu’il était temps de passer aux choses sérieuses, s’adressa à Nora.

 

 

 

          -- Nora, ma grande, alors, ton programme est opérationnel, on peut lui faire confiance ?

 

 

 

          -- Fin prêt, il n’attend plus qu’un volontaire un peu barjot pour l’essayer, tu connais quelqu’un qui correspond au profil !

 

 

 

          -- Oui, justement, à ce propos, pourquoi, faut-il absolument y aller à deux, je n’en vois pas bien l’utilité !

 

 

 

          N’Bioco prit alors la parole.

 

 

 

          -- Hélas, je comprends et j’ai bien peur qu’il ne faille en passer par là, vous connaissez les raisons qui nous poussent à déclencher les explosions en même temps, un décalage dans la mise à feu, et il y a de fortes chances pour que le flux se réalimente de lui-même ; d’autre part, nous devons nous assurer qu’il existe le même décalage temporel entre les deux sources de fuite et pour être sûr que le signal sera bien relayé dans le sous-programme logé dans l’autre bombe, il nous faut impérativement passer par une commande mentale, c’est la seule façon d’être certain qu’il sera bien instantané !

 

 

 

          -- Nous ne pouvons faire confiance aux hyper ondes pour les liaisons entre les détonateurs des explosifs, vu que vous serez baignés dans un environnement qui en sera saturé et les erreurs, pour les raisons que vous pouvez imaginer, sont exclues à ce niveau-là. Seule une communication mentale est possible, à condition toutefois qu’il n’y a aucun décalage temporel, d’ailleurs à ce propos, nous avons prévu une série de tests à effectuer sur place pour vous en assurer !

 

 

 

          -- Vous savez Derek, si nous avions pu faire autrement, nous l’aurions fait, il n’est pas dans notre intention d’exposer plus de personnes qu’il n’en faut, et hélas, nous ne connaissons personne, autre que Deborah et vous, pour mener à bien cette mission !

 

 

 

          -- Oui, je sais, mais j’espérais quand même qu’on trouverait une autre solution !

 

 

 

          -- Non, Derek, et je peux t’affirmer qu’on a vraiment cherché … mais en vain … désolée ! Termina Nora.

 

 

 

          -- N’en parlons plus, je sais que vous avez fait le maximum, mis à part cela, avez-vous d’autres choses à nous communiquer ?

 

 

 

          -- Non, répondit N’Bioco, dès que vous vous sentirez prêts, vous pourrez partir quand vous voulez !

 

 

 

          Et Nora de poursuivre.

 

 

 

          -- Ah ! Une dernière chose, les explosifs sont vraiment très lourds, aussi, comme on ne peut utiliser un navire pour les conduire jusqu'à Sirius et Electre, il vous faudra les acheminer vous-mêmes par téléportation, aussi, je vous recommande, de faire le plein d’énergie avant de partir, et même, comme je ne sais pas si le passage en consomme beaucoup, de le refaire après avoir acheminé vos pétards !

 

 

 

          -- C’est tout, rien d’autre à emmener, pas d’autres recommandations !

 

 

 

          -- Si, répondit, Ugo, vous emmenez avec vous tous nos espoirs, aussi faites-en bon usage !

 

 

 

          -- Pas question, on n’accepte pas de supplément de bagages, par contre, au retour, comme on sera à vide, on pourra, si vous le désirez, en profiter pour vous ramener une provision de bonnes nouvelles, mais uniquement si vous acceptez les souvenirs !

 

 

 

          Une nouvelle fois, l’assemblée du bord s’éclaffa.

 

 

 

          Deborah et Derek, finirent par s’éclipser pour se rendre à la crypte.

 

 

 

          Sur place, à l’extérieur, les quatre engins explosifs les attendaient ainsi que l’ordinateur portable.

 

 

 

          Ils pénétrèrent à l’intérieur, Derek embrassa une dernière fois Deborah et s’installèrent une nouvelle fois dans leurs cuves.

 

 

 

          A peine eurent-ils réussi leurs sorties en Agartha, que Derek voulut téléporter les bombes jusqu'à Electre, mais il dut se rendre à l’évidence, Nora avait raison, leurs pouvoirs télépathiques n’étaient pas assez puissants ou bien ils ne savaient pas encore les utiliser à pleine puissance et ils durent s’y mettre à deux pour en acheminer une seule.

 

 

 

          Une fois les bombes sur place, ils firent pénétrer la première dans la fuite et la portèrent jusque dans le passé à l’endroit préconisé par Nora, ensuite, ils durent refaire le plein pour s’occuper du deuxième engin et lui faire subir le même sort.

 

 

 

          Entre chaque voyage, ils durent se réalimenter en énergie tant la consommation était importante, une fois les quatre explosifs en place, ils étaient mentalement épuisés et leurs recharges en énergie, bien qu’ils n’en manquaient pas ne suffisaient plus à les « retaper » psychiquement, Derek préconisa une pause.

 

 

 

          … On s’arrête cinq minutes, je suis en nage, pas toi ?

 

 

 

          … T’es en nage, ça ne se voit même pas !

 

 

 

          A sa réponse, Derek constata qu’elle avait malgré tout le moral, vu que sous cette forme, il ne risquait pas de transpirer.

 

 

 

          Mais une interruption de quelques minutes, si cela ne leur apportait pas de soulagement physique, cela leur occasionnait au moins un répit moral.

 

 

 

          Ils en profitèrent pour se remémorer les consignes qu’on leur avait données.

 

 

 

          … Ok, Deb, tu as vu comment je m’y prenais pour passer de l’autre côté !

 

 

 

          … Aucun problème, je t’ai espionné mentalement lors des passages des bombes !

 

         

 

          … On va se rendre dans le passé, chacun de notre côté, une fois sur place, on essayera les tests de communications préconisés par N’Bioco et Nora, ok ?

 

 

 

          … Mais on a déjà effectués les tests, quand on a apporté les bombes sur place, non ?

 

 

 

          … Non, on a communiqué en local, nous étions proche l’un de l’autre, mais, là, on va effectuer les tests grandeur nature, de fuite à fuite, il est possible que cela ne fonctionne pas !

 

 

 

          … Sois optimiste, mon vieux, c’est bien la première fois que je te « vois » dans cet état, sans avoir le moral, alors, on traverse, on fait les essais, on fait péter les deux bombinettes et on se casse, on n’a qu’un forfait horaire, je te signale, pas à la journée, n’oublies pas !

 

 

 

          Derek ne put s’empêcher de « sourire » mentalement, décidément, son optimiste était contagieux.

 

 

 

          Il quitta Deborah pour Electre.

 

 

 

          … A toute de suite chérie, le premier arrivé attend l’autre, ok ?

 

 

 

          Et il disparut pour Electre.

 

 

 

          A peine arrivé, il pénétra dans la faille, et se rendit de l’autre côté, où il fut fraîchement accueilli par Deborah.

 

 

 

          … C’est à cette heure-ci qu’on arrive, ça fait au moins une heure que je t’attends !

 

 

 

          … Désolé, chérie, mais la circulation, tu sais ce que sait, non ?

 

 

 

          … Bon, le test ce n’est plus la peine, ça a l’air d’aller, non !

 

 

 

          … Oui, tes retours sont instantanés, ça devrait faire l’affaire !

 

 

 

          … Dis-moi, Derek, il y a cependant une phase du plan que l’on n’a évoquée avec personne, et je dois dire qu’elle me trotte dans la tête depuis longtemps, pour envoyer l’impulsion déclenchant les bombes, toi et moi, ON DOIT RESTER A PROXIMITE des engins explosifs, non ?

 

 

 

          … … !

 

 

 

          Derek ne répondit pas.

 

 

 

          … Théoriquement, on ne risque rien, non ?

 

 

 

          … … !

 

 

 

          Derek ne répondait toujours pas.

 

 

 

          … Oui, chérie, tu as raison, inutile d’en parler, on perd du temps inutilement.

 

 

 

          … Je suis prête, tu peux y aller quand tu veux, … je t’aime !

 

 

 

          … On a théoriquement trente secondes avant le déclenchement du feu nucléaire, aussi, dès que j’aurais envoyé l’impulsion, pense fortement à la Terre, ne perds pas de temps à admirer le paysage, on reviendra en vacance l’an prochain si tu veux, le premier arrivé attend l’autre

 

 

 

          … moi aussi je t’aime !

 

 

 

          Deborah eut le temps d’ajouter.

 

 

 

          … Et le dernier a un gage !

 

 

 

          A peine eut-elle fini de dire cela, que l’ordre de mise à feu de Derek traversa son esprit pour aller ensuite rejoindre le programme incorporé dans la première bombe, elle n’eut que le temps de se remémorer l’image de la Terre que déjà, elle quittait cet espace-temps.

 

 

 

          Derek avait envoyé l’ordre, mais ce qu’il n’avait pas dit à Deborah, c’est qu’il devait attendre le retour du signal, côté Deborah, que le programme devait lui retourner, façon comme une autre de s’assurer que l’ordre avait bien été enregistré par le programme, et qu’à partir de ce point, la mise à feu ne pouvait plus se déprogrammer.

 

 

 

          Mais cela prendrait dix secondes de plus, s’il n’y avait pas trop de perturbations, sinon

 

 

 

          … Derek le savait, mais il n’avait pas jugé bon d’en informer sa copine, pourquoi l’inquiéter un peu plus, elle l’était déjà bien assez.

 

 

 

          De plus, la connaissant comme il la connaissait, elle aurait été capable de rester avec lui afin de partager son sort, déjà que lui, Derek ne savait pas s’il allait pouvoir rentrer, et à aucun moment, il n’aurait accepté qu’elle le suive jusqu’au bout dans cette aventure.

 

 

 

          Seul Kervial, son père était au courant de ce petit supplément au programme et en cas de problème, s’il ne devait pas revenir, il avait le très mauvais rôle d’annoncer à sa fille, la mauvaise nouvelle.

 

 

 

          Ces quelques secondes lui parurent une éternité, et quand enfin il reçut la réponse du software, il n’eut qu’un bref « soupir » mental et quitta immédiatement les lieux.

 

 

 

           Il n’était pas parti depuis cinq secondes, qu’il eut l’impression d’être pris dans un formidable maelström de perceptions, car il avait laissé ouvertes ses antennes pour recevoir la réponse informatique du programme. Il se sentit balayé, roulé dissocié, émietté et enfin éparpillé, et pour finir, il perdit conscience.

 

 

 

          Deborah, elle, était revenue dans le consortium espace-temps contemporain qu’elle venait de quitter.

 

 

 

          Elle appela Derek, mais ne reçut aucune réponse de sa part.

 

 

 

          Inquiète, elle se rendit à bord du vaisseau où l’attendaient ses amis.

 

 

 

          Tous, semblaient déborder de joie, et se congratulaient entres eux.

 

 

 

          Elle, qui en cherchant à approfondir les raisons de cette liesse, apostropha brutalement son père.

 

 

 

          … Et Derek, tu as des nouvelles ?

 

 

 

          Kervial, prenant conscience que sa fille se trouvait prés de lui, reprit instantanément une figure plus grave et lui répondit.

 

 

 

          -- Deb, ma chérie, c’est toi, tu es rentrée ?

 

 

 

          … Oui, mais sais-tu où se trouve Derek, il n’est pas encore revenu ?

 

         

 

          -- Non, ma chérie, il ne devrait plus tarder, maintenant !

 

 

 

          Deborah ne disait rien, mais commençant à s’inquiéter, posa quand même la question !

 

 

 

          … Apparemment, vu votre tête à tous, il semblerait que cela a fonctionné !

 

 

 

          C’est Nora qui lui répondit.

 

 

 

          -- Oui, apparemment, la progression de l’anomalie a été stoppée, depuis quatre heures environ, nous attendons maintenant de savoir si elle va régresser !

 

 

 

          -- Vous êtes partis depuis huit jours maintenant et honnêtement, nous avons douté de votre réussite, surtout qu’après votre départ, l’anomalie a fait un bond en avant énorme, elle se trouve actuellement aux portes de notre système solaire et, il y a environ quatre heures, elle a cessé net sa progression !

 

 

 

          -- Des navires de la flotte terrienne sont actuellement sur place, en périphérie de la faille spatio-temporelle et sont en train d’effectuer une série de mesures pour voir si la ligne de l’anomalie régresse ou pas !

 

 

 

          -- Pour Derek, les décalages temporels sont si énormes, qu’il te faudra t’armer de patience, le voyage que vous avez effectué pour vous rendre de l’autre côté, peut avoir des délais différents, à l’aller comme au retour ; quatre heures comme apparemment tu as mis pour revenir, car je suppose que tu es partie dès le signal envoyé, mais, il peut aussi prendre aussi plus longtemps, voir une journée même, même si pour toi, cela ne dure que quelques secondes ou minutes, il n’y a pas de règle !

 

 

 

          … Tu mens mal, Nora, je ne te crois pas !

 

 

 

          N’Bioco reprit la parole.

 

 

 

-- Non, Deborah, Nora ne ment pas, ces voyages sont affectés par deux phénomènes synchroniques qui nous empêchent de prévoir avec certitude leurs durées.

 

 

 

          -- D’une part, vous avez votre passage en Agartha, en Astral, si vous préférez, les temps sont différents avec notre Univers, vous les avez sans doute déjà expérimentés à vos dépends je suppose, ensuite, le couloir temporel que vous avez utilisé, n’est pas le même, le temps ne s’écoule sans doute pas de la même manière dans la faille de Sirius que dans celle d’Electre, ces deux phénomènes, passage en Astral et flux temporels différents cumulés, peuvent entraîner des décalages de temps sur le voyage de retour de Derek, pouvant parfaitement atteindre la journée, peut-être même deux !

 

 

 

          Cette fois, Deborah, en écoutant cette explication, se sentit rassurée, à moitié mais rassurée tout de même.

 

 

 

          Elle se calma un peu et commença à participer à la liesse collective.

 



12/11/2011
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