Du radeau à la terre ferme
Du radeau à la terre ferme
…C’est à ce moment-là que les scènes se sont succédées, sur mer (ou plutôt sous la mer devrais-je dire) et chapeau pour les décorateurs ainsi qu’aux costumiers, ils ont vraiment fait travailler leurs méninges. Toute la panoplie du fantastique y est passé, du plus petit au plus gigantesque, du plus laid au plus harmonieux, du plus gentil au plus féroce.
Guidé aussi bien par l’instinct de survie que celui de la curiosité, l’un de ces poissons a quitté son élément liquide et s’est aventuré sur la terre ferme.
Et qui retrouvons-nous dans cette aventure ? Prométhée, qui comme de bien entendu fait partie du voyage, pour rien au monde il n’aurait voulu rater ça. Certes il n’a pas choisi le chemin le plus court, il aurait pu attendre tranquillement, tapi dans une molécule d’eau, de se faire évaporer par un rayon de soleil, retomber un peu plus tard sous forme de pluie, se faire absorber par une plante terrestre puis dévorer par un descendant de notre amphibien précurseur de ChristopheCOLOMB à quatre pattes. Non, il a préféré une voie plus tumultueuse, passant tour à tour d’une molécule d’eau ou du cœur d’une algue, au centre d’une amibe ou d’une ouïe d’un poisson, tout en transitant dans un mollusque. Il a vécu ainsi des millions de fortunes et d’infortunes différentes, attendant patiemment son heure, ces dernières réincarnations l’on mûrit et maintenant il se sent prêt pour de nouvelles aventures.
Et c’est ainsi que Prométhée se retrouva sur la terre ferme avec l’intime conviction que cette nouvelle péripétie sera pour lui plus riche et plus grandiose que la précédente…
…Certes le décor ne m’était pas tout à fait inconnu, j’ai eu l’occasion, grâce à la complicité de violents orages, de pouvoir m’échapper de mon environnement maritime. Au cours de ces escapades, j’ai pu admirer ces immenses forêts pluviales bordées de vastes contrées herbeuses, vierges ou presque de tout animal. Seuls les insectes y régnaient en maîtres incontestés. Quel plaisir de faire du toboggan sur ces longues feuilles verdoyantes de la canopée ? De venir grossir un rû serpentant à travers la forêt, emprunter une cataracte grondante et vrombissante, se laisser porter au fil de l’eau et enfin de retourner à l’océan. Sans parler du plaisir rare des couchers de soleil, complètement inconnu aux fonds des mers. Le plaisir de se faire réveiller à l’aube, par la douce et chaude caresse de l’astre diurne. Tous les matins du monde résumés en quelques minutes, que du bonheur! Et ces odeurs, complètement inconnues en mer, des fragrances rares, enivrantes pour tout dire divines. L’Olympe terrestre et le jardin d’Eden réunis, de quoi en resté scotché.
A chaque fois que je m’y rendais, j’avais l’impression de prendre un bain de jouvence. Un vrai luna-park ! Et c’était avec le cœur lourd à chaque fois qu’il me fallait rentrer car le travail n’était pas terminé en mer.
J’aimais beaucoup ces excursions clandestines de l’époque ; elles me reposaient de l’activité croissante du fond des mers. Aussi, c’est avec une certaine émotion et un grand plaisir que je pris la file d’attente des candidats à cette nouvelle migration…
…C’est donc sur la Pangée, un soir à la nuit tombée, que nos troupes de débarquement terrestre (TDT) ont décidé de passer au plan B (tout comme le plan A le plan B consistait à l’invasion d’un nouvel espace environnemental dans le cas présent, c’était celui d’un continent à l’air libre), et nous avons donc mis pied à terre vers – 395 millions d’années, ces unités étaient peu nombreuses au début mais très vite le gros de l’armée a suivi.
Au début, nous avons procédé par raids nocturnes, car la chaleur du soleil nous aurait rôtis à petit feu. Puis, par la suite nos incursions ont duré plusieurs jours, jusqu’au moment ou nous ne sommes plus rentés à la base. Ne trouvant aucun ennemi pouvant nous nuire, nous commençâmes notre progression à l’intérieur des terres.
Quelques millions d’années plus tard, nous avons envahi tout le continent, les deux continents plutôt, car entre temps la Pangée s’était fractionnée en 2. Sur la terre ferme, nous allons aussi nous diversifier, et là crois-moi, on va mettre le paquet pour ce qui est de la divergence. Cette fois, contrairement à notre période aquatique, tout va être gigantesque. Mises à part quelques formes microscopiques telles les bactéries, les microbes et autres virus (qui avaient débarqué avant nous), on s’est vraiment pris la tête et on a assurément vu très grand…
…A cette époque, le ravitaillement de nos unités de combat était assuré par nos troupeaux d’herbivores, (les Brontosaures et les Diplodocus) qui se déplaçaient à l’arrière du gros de nos troupes, pas loin de 20 m de long pour les premiers et 25 m pour les seconds. Je ne te raconte pas la taille des steaks pour les barbecues.
Pour conquérir ces nouveaux territoires, nous nous sommes très vite, bien organisés.
Nos forces terrestres de destruction massives (FTDM) notre fameuse unité d’assaut, la compagnie des Tyrannosaurus 15 mètres de haut, tu te rends compte, un immeuble ambulant de presque 6 étages. Nos éclaireurs grenadiers voltigeurs les (EGV), les Deinonychus, armés chacun d’un poignard à chaque pied, constituaient nos forces d’interventions rapides les (FIR) et enfin, il n’y pas de bonnes armées sans force aérienne de reconnaissance, nos planeurs furtifs d’observation, les (PFO) nos insectes volants, tu les aurais vus ! Des libellules de 65 cm d’envergure, (t’as bien lu 65 cm, tu t’imagines les soirées de l’époque au bord d’un étang, que du bonheur !)
Pour pêcher ! Un petit appât de mille-pattes d’1,80 de long, j’aimerais pas me trouver un soir face-à-face avec le poisson.
Et pour terminer, je ne peux pas finir sans te parler de nos défenses aériennes et terrestres les (DAT). Une escadre de quelques millions de planeurs de la mort, les Quetzalcoaltus, d’une envergure d’une bagatelle de 12 m de large. Ils partaient en reconnaissance chaque matin et ne rentaient que le soir venu, un authentique remake de Pearl harbor.
Au sol nos trois régiments de blindés, tout d’abord les Hadrosaures la 1ère division de chars blindés, de grands herbivores bipèdes à bec de canard, (la 1ère DB) quasiment invincibles constituaient la force d’appuis, la 2 éme division de chars unité de combat (la 2éme DB), les Triceratops à 3 cornes (parmi les plus farouches) et les Stégosaures (unité de chars à blindage double) nos 2 unités d’assauts terrestres les (UAT).
Le plus petit de ces chars ne pesait que la broutille de 7 tonnes et le plus lourd quelques 15 à 20 tonnes.
Nous étions parfaitement organisés pour conquérir et régner en seul maître sur la planète jusqu’à la fin des temps.
…170 millions d’années on a réussi à tenir, un record de longévité, et ensuite on ne sait pas trop ce qui s’est passé. Dans un premier temps, nos troupeaux sont tombés malades et très vite nous n’avions eu plus rien à manger.
Ce fut notre Berezina, on n’a pas vraiment compris ce qui nous arrivait, car enfin nous n’avions pas d’ennemis sur cette terre. Qui avait bien pu empoisonner nos réserves de viande ? Ensuite ce fut notre tour, nous sommes tous morts de faim.
Quelle triste fin pour des reptiles rois, que dis-je empereurs, (un peu comme Alexandre le grand, nous allons mourir et notre empire sera divisé par notre descendance), tant d’efforts pour rien, tant de sacrifices pour voir s’éteindre notre lignée. Cependant, notre détermination fut quand même récompensée. De très petites unités qui restaient le plus souvent éloignées du gros de la troupe, des cousins à nous, ont survécu miraculeusement. Pourquoi, allez savoir, ils avaient sûrement moins d’appétit que nous. Il faut dire que nous, il ne fallait pas nous en promettre.
On a donc su, que cette branche de notre famille avait survécu et quelque part cela fait chaud au cœur.
Il y a eu paraît-il une autre espèce à survivre, toujours des cousins à nous mais très très éloignés, c’est bien simple, ils ont fait sécession au tout début de notre arrivée sur terre, et ont filé droit après le débarquement et ont prit le maquis. On les croyait mort, bien sûr on en a croisé 1 ou 2 de temps à autre mais ils ont refusé tout contact avec nous, va savoir pourquoi ! Il faut te dire que la plupart du temps, ils nous servaient de casse-croûte.
Ils avaient leur quartier général dans le sol, les trous, les grottes, tout était bon pour qu’ils se cachent ou bien sûr, on ne pouvait pas les poursuivre Tout compte fait, il est bien possible que ce soit eux qui nous ont fait cette embrouille, c’était des opportunistes rusés et patients qui grappillaient dans nos provisions, depuis le temps qu’ils voulaient notre place. Mais comment auraient-ils bien pu faire, ça ? Ce fut un vrai mystère, c’est vraiment fort de chez fort.
Et Prométhée dans cette affaire, il ne verra plus ces bons vieux dinos, quel dommage il s’y était attaché depuis le temps. Il avait suivi leurs progressions, leurs évolutions, très proche d’eux, il avait connu leurs joies, leurs peines et maintenant, il venait d’assister à leur extinction. Il fallait tourner la page, voir un peu du côté des derniers survivants…
…Les premiers (les oiseaux) semblent être très à l’aise dans les airs (bien plus que leurs ancêtres)
Les seconds, contrairement aux premiers, non seulement ils ne volaient pas mais ne pondaient pas d’œufs. C’était fort ça. Leurs petits arrivaient sous forme de produits finis, sans l’emballage. Quel temps de gagné ! Et ce n’est pas tout, ils n’étaient pas obligés de leur apporter à manger dans les premières années de leurs vies. Leurs nourritures se trouvaient dans des espèces de sacs qu’ils portaient sur le ventre. Ça aussi c’était fort, elle est pas belle la vie, ils pouvaient aller où ils voulaient sans être tenus de couver et de chasser pour nourrir leurs petits. Quel avantage par rapport aux autres ! Il va falloir que je les surveille de plus près durant ces 100 millions de prochaines d’années…
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 13 autres membres